Mieux identifier un champignon pathogène des agrumes pour empêcher son arrivée en Europe
L’unité de mycologie du Laboratoire de la santé des végétaux de l’Anses a développé un test PCR permettant de distinguer le champignon responsable de la maladie des taches noires des agrumes d’un champignon d’une autre espèce proche, découverte récemment. Ce test améliorera la capacité à détecter ce champignon pathogène et donc d’empêcher son introduction en Europe.
La maladie des taches noires des agrumes affecte la plupart des plantes du genre Citrus, notamment les citronniers et les orangers. Elle est provoquée par le champignon parasite Phyllosticta citricarpa. Si la présence du champignon n’altère pas le goût des fruits infectés, les taches noires qui apparaissent sur ces derniers les rendent non commercialisables. De plus, la maladie diminue la productivité des arbres fruitiers en affectant également les feuilles et en provoquant une chute prématurée des fruits. L’impact économique de cette maladie est par conséquent majeur.
À l’heure actuelle, le champignon est présent sur tous les continents producteurs d’agrumes à l’exception de l’Europe. Afin d’éviter son introduction, il a été classé comme organisme de quarantaine par l’Union européenne : les agrumes importés ne doivent pas être porteurs du champignon. Le risque d’introduction est d’autant plus important que des citrons contaminés ont été découverts en Tunisie en 2019. « Il s’agissait de la première fois que le champignon était détecté sur des plantations en Afrique du Nord, cela a montré qu’ il pouvait s’adapter au climat méditerranéen, explique Renaud Ioos, chef de l’unité de mycologie du Laboratoire de la santé des végétaux de l’Anses. Il pourrait donc se propager dans les cultures d’agrumes du sud de l’Europe en cas d’introduction. »
Une nouvelle espèce de champignon pathogène découverte
En 2017, une espèce apparentée à Phyllosticta citricarpa a été découverte par une équipe scientifique internationale. Elle a été nommée Phyllosticta paracitricarpa. « Ces deux espèces sont très proches et aucun des tests de diagnostic disponible n’était capable de faire la distinction entre les deux, explique le scientifique. Or seul Phyllosticta citricarpa est pour le moment considéré comme un organisme de quarantaine. Des travaux sont en cours pour déterminer si Phyllosticta paracitricarpa peut lui aussi provoquer la maladie de la tache noire des agrumes. Cependant, tant qu’il n’est pas officiellement déclaré comme un organisme de quarantaine, il n’est juridiquement pas possible d’interdire l’entrée sur le territoire de végétaux porteurs de ce champignon. Il est donc important de pouvoir différencier les deux espèces. »
L’unité de mycologie, qui est Laboratoire de référence national et européen pour les champignons pathogènes des plantes, a donc développé un nouveau test capable de distinguer les deux espèces. Elle s’est pour cela associée à une équipe de l’université de Zhejiang en Chine, qui disposait de souches de Phyllosticta paracitricarpa. « Trouver des parties du génome spécifiques d’une seule des deux espèces a été compliqué et a pris du temps, poursuit le chef d’unité. Nous avons dû séquencer les génomes entiers pour les comparer. » Les scientifiques ont réussi à trouver des différences génétiques, ce qui a confirmé qu’il s’agissait de deux espèces distinctes et a permis de développer un test PCR permettant de les distinguer. Celui-ci est en passe de devenir une méthode de détection officielle en France et son utilisation sera encouragée auprès des autres pays européens.